Horizon 2020 : recommandations des conseils en innovation

Début mai 2012, dans le cadre de la préparation du programme européen de soutien à la recherche Horizon 2020, l’Association des Conseils en Innovation, dont InnoviSCOP est membre, a présenté ses cinq recommandations pour une Europe plus innovante.

L’Union européenne consacre à la recherche et développement 2% de son PIB alors que les États-Unis et le Japon y consacrent respectivement 2,8 et 3,4% du leur. Pour éviter à l’Europe de perdre du terrain, l’Union européenne s’est fixée comme objectif, dans le contexte de la stratégie Europe 2020, d’accroître ses dépenses de R&D en les portant à 3% du PIB d’ici à 2020. De fait, la recherche et l’innovation sont des enjeux déterminants pour progresser dans la réalisation des objectifs de la stratégie européenne, à savoir une croissance intelligente, durable et inclusive.

Pour assurer ce défi, le nouveau programme-cadre Horizon 2020 sera conçu de manière à mieux intégrer la recherche et l’innovation. Plus précisément, la Commission propose de l’organiser autour de trois priorités :

  • L’excellence scientifique a pour but d’élever le niveau d’excellence de la base scientifique européenne ;
  • La primauté industrielle résulte de l’intégration de l’innovation dans le programme Horizon 2020 et vise à améliorer la compétitivité européenne ;
  • Les défis sociétaux favorisent une nouvelle approche, centrée sur la réponse aux grands défis et non plus sur des secteurs.

Or il apparaît essentiel de tirer les enseignements du programme-cadre précédent (7ème PCRD) et d’optimiser la mise en œuvre d’Horizon 2020. Dans ce cadre, l'Association des Conseils en Innovation, née de la fusion de l'ASCOFI et de l'Unatrantec, est particulièrement représentative du secteur des projets collaboratifs innovants avec en son sein 27 sociétés travaillant sur ce secteur, dont certaines de grande taille, représentant une part importante des acteurs français du domaine.

Cette représentativité a permis à l’association de jouer un rôle moteur dans plusieurs actions d’intérêt collectif. À l’occasion de l’émergence du nouveau programme Horizon 2020, l'association a formé un groupe de travail qui, après consultation de ses membres, a émis les cinq recommandations suivantes.

1. Donner toutes leurs chances aux idées novatrices

Les évaluations de projets européens potentiels sont aujourd’hui réalisées sur des documents écrits synthétisant leur raison d’être, leur réalisation et les impacts attendus. Certes, l’innovation scientifique, la qualité de la recherche et du consortium et les progrès attendus sont des éléments clés, mais la compétition tend aussi à donner une importance toute particulière à la qualité formelle du projet et du document porteur du projet. Cet état de fait tend à donner un poids très fort à la capacité du consortium et du coordinateur à monter un projet et un document formellement irréprochables. Ceci pénalise naturellement les porteurs d’idées qui ne sont pas coutumiers des projets européens ou qui ne disposent pas des moyens nécessaires au montage du projet et à la rédaction du document support. L’une des conséquences est que certaines structures porteuses d’idées novatrices peinent ou renoncent à obtenir des financements européens alors même que certaines de leurs idées pourraient être d’un intérêt majeur.

Ainsi, les mesures proposées ont pour objet de donner à l’Europe des moyens spécifiques permettant de détecter et donner toutes leurs chances à des idées résolument novatrices, quels que soient leurs porteurs :

  • Établir des appels d’offres dédiés aux idées et concepts novateurs et non à des projets. Mettre en place des évaluations spécifiques (panel important d’experts, présentation orale, etc.) et sélectionner ainsi les idées les plus prometteuses ;
  • Financer pour les idées et concepts sélectionnés le montage de projets et la rédaction des propositions écrites associées. Mettre en place un système de vérification de la qualité des projets ainsi montés et financer ceux dont le montage le mérite.

2. Placer les PME au coeur de l’innovation

Si les PME disposent dans le 7ème PCRD de plusieurs facilités d’accès à la recherche européenne (objectif politique de 15% du budget dans le programme « Coopération », existence des projets de recherche pour les PME ou pour les associations de PME dans le programme « Capacités », financement sous forme de subvention à 75% des dépenses totales), leur participation au PCRD est en réalité difficile pour plusieurs raisons : l’accès à l’information, la complexité des procédures, l’investissement nécessaire pour préparer une proposition de qualité, les délais, etc.

La mesure proposée est l’élaboration d’un programme propre aux PME. Celui-ci donnerait un signal politique fort d’un véritable soutien ainsi que des moyens adaptés spécifiquement aux PME :

  • Élaborer un programme dédié, disposant d’un budget propre, intitulé « PME », sans thématique, dans lequel chaque proposition déposée comprendrait au moins 75% de PME et dont 50% de la demande de financement total serait pour les PME ;
  • Dans ce cadre, mettre en place un système de prime exploratoire (« Voucher ») permettant le financement d’experts externes (marketing, étude de marché, montage de projets, veille) pour la préparation du projet, implémenter des délais très courts (négociation courte du contrat, démarrage très rapide après le dépôt ou possibilité de démarrer les travaux avant la signature du contrat), permettre de fixer librement la durée du projet, rendre éligible des actions de valorisation des résultats à l’issue du projet et intégrer la possibilité de financement bancaire à taux réduit pour les PME.

3. Promouvoir l’innovation de service

L’innovation de service est un concept relativement récent qui regroupe le développement de services innovants non obligatoirement technologiques en apportant une valeur ajoutée aux solutions existantes (performance, méthodes, rapport qualité/prix...) ou permettant d’accélérer la mise sur le marché d’un produit. Un exemple célèbre est le concept de « réseau social » sur Internet. Ce type d’innovation est aujourd’hui peu financé par les pouvoirs publics. Une innovation de service est pourtant souvent génératrice de croissance économique et de retombées sociétales. De plus, beaucoup de sociétés européennes sont orientées « services » et sont donc particulièrement concernées.

La mesure proposée est simple dans son esprit mais nécessite une révolution culturelle. Elle consiste à introduire ce concept dans tous les programmes publics orientés vers l’innovation :

  • Introduire et financer l’innovation de service dans l’ensemble des programmes et appels à projets.

4. Améliorer les évaluations des propositions

Les évaluations de projet font souvent l’objet de discussions polémiques sur leur pertinence. Elles sont aujourd’hui réalisées sur la base de quelques critères, ceux liés au caractère scientifique et technique étant souvent prépondérants. Un grand nombre d’évaluateurs ont un profil technique et scientifique. Par ailleurs, la notation sur un faible nombre de points pour chaque critère ne permet pas de différencier les évaluations de projets de manière significative. Enfin, le nombre réduit d’évaluateurs par projet et le temps qui leur est imparti limitent l’intérêt et la pertinence des évaluations qui ne sont pas toujours en rapport avec les efforts financiers et humains considérables déployés pour les montages.

Les mesures proposées ont pour but d’augmenter la transparence, la qualité et la pertinence des évaluations afin d’optimiser la sélection de projets.

  • Ouvrir les évaluations à des éléments non technologiques et scientifiques en diversifiant le type de critères et d’évaluateurs ;
  • Améliorer la précision et la pertinence des évaluations en augmentant le nombre de critères, le nombre de points par critère, le nombre d’évaluateurs et le temps alloué à chaque évaluateur.

5. Exiger une gestion de projet de qualité

Les projets collaboratifs européens sont, par nature, complexes. Ils incluent différents types d’organisations partenaires et rassemblent plusieurs nationalités, disciplines, secteurs et méthodes de travail. Le pilotage et la mise en œuvre de ces projets est alors une activité difficile. À titre d’exemple, la Cour des comptes européenne indique ainsi dans un rapport publié en 2009 relatif à l’analyse de certains types de projets : « Cependant, alors que tous les projets étaient qualifiés d’excellents au moment de leur sélection par la Commission, ils n’étaient pas plus d’un tiers à être classés dans la catégorie 'bons à excellents' après leur mise en œuvre ». L’expérience passée montre clairement l’influence positive considérable d’un pilotage et d’une gestion de projet efficaces et professionnelles sur leurs performances, résultats et impacts.

Les mesures proposées visent à garantir, au delà d’une coordination scientifique classique, un pilotage stratégique performant et une gestion administrative et financière professionnelle des projets financés.

  • Financer à 100% les activités de pilotage de projet ainsi que celles de gestion administrative et financière ;
  • Promouvoir et exiger, d’une part, et contrôler avec de véritables conséquences sur les projets, d’autre part, la qualité du pilotage et de la gestion des projets.
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